Une musique de vagabond. De trimardeur…
Axel Matrod, aka El Gato Negro, est quelque chose comme le fils caché de Blaise Cendrars et de Celia Cruz. Un cousin éloigné de Jack London, qui aurait rangé ses mots dans une guitare plutôt que sur du papier. A l’adolescence, il a décrété que le rose de sa Toulouse natale était certes une jolie couleur, mais qu’il y en avait quantité d’autres, au delà de l’océan. Le vert acide du citron lime, le jaune soleil des poivrons, le rouge vif des piments, le brun clair du dulce de leche…
En Amérique du Sud, qu’il a parcouru de long en large et en travers, il a trouvé sa voix et une voie : créer une musique de vagabond, qui emprunte ici et là, à tous les rythmes poivrés qu’il a croisé au long de son périple. A 15 ans, comme il chante sans arrêt dans l’atelier de sérigraphie où il apprend un métier, son patron lui offre une guitare. Comme n’importe quel adolescent, il écoute du rap et du reggae, mais le Buenavista Social Club change sa vie, et à la suite d’un premier voyage au Brésil, il sait que sa route se dirige vers le continent sud Américain. Argentine, Bolivie, Paraguay… six mois sac au dos à parcourir les terres latines. De retour en Europe, il met le cap pour Barcelone où il devient musicien de rue et de bars, rencontrant d’autres expatriés qui lui enseignent les arcanes de cette musique qui l’habite. Un jour que la Guardia Civil lui a confisqué sa guitare, parce qu’il faisait la manche sur les ramblas, un compatriote, dans un bar où il chante, lui en offre une. Il se nomme Manu Chao !
Reparti pour le Mexique, il va rester quatre ans sur le continent : Guatemala, Honduras, Nicaragua, Panama… Il fait du théâtre au Pérou, monte des groupes successifs, avec d’autres voyageurs au long cours, comme lui. Rebaptisé El Gato Negro, il vit désormais de sa musique, et décide d’en laisser une trace en enregistrant un album, avec ses divers complices. Parmi eux, il y en a une qui va devenir particulière. Irina est cubaine, venue chanter en duo en Argentine. A Buenos Aires, où leurs chemins se croisent, ce carrefour devient une autoroute éclairée d’évidence. Elle est un génie de la musique : diplômée de toutes les structures étatiques cubaines, avec l’oreille absolue, une maîtrise de la théorie, et une virtuosité sur quantité d’instruments. Elle crée les arrangements de cet album liminaire, et Axel le chat noir l’embarque en duo à travers cette Amérique latine qu’il connaît désormais comme sa poche.
Revenu s’établir à Toulouse, avec Irina devenue son épouse, El Gato Negro monte un groupe définitif autour de leur duo, El Gato Negro Y Su Combo Tropical, qui tourne désormais depuis trois ans, et vient d’enregistrer ce Cumbia Libre, au titre qui sonne comme un manifeste. Libre, de se frotter au reggae, au hip hop, à la samba, à la salsa et au son’ cubano. Libre d’assaisonner ces chansons en espagnol et brésilien, saupoudrées de quelques mots de français, des couleurs tropicales picorées dans les racines caribéennes et latines qu’il s’est découvert.
Axel écrit et compose, livre des chansons brutes à Irina, la Gitana Tropical, qui leur coud à même la peau de riches parures de cuivres et de percussion. Sur Cumbia Libre, on peut entendre du cha cha, du boléro, de la cumbia, toutes ces musiques latines exubérantes et chaleureuses, mais ici modernisées, et qu’El Gato Negro, avec son expérience de la rue, apporte au public avec un sens de la proximité rare, transformant les concerts en pandémoniums de danses et de rythmes partagés.
En cet été 2015, au moment où Cumbia Libre deviendra réalité à travers le jeune label Belleville Music, El Gato Negro retrouvera Manu Chao, pour un festival d’été, dans tous les sens du terme, où ils partageront l’affiche, et la scène. Avant de poursuivre le vagabondage, à travers les scènes de France, d’Europe et d’Amérique latine, partout où l’on réclame cette chaleur communicative et vitaminée qu’El Gato Negro Y Su Combo Tropical délivre avec un enthousiasme revigorant.
Une musique de vagabond.
Parce que les frontières, en vrai, n’existent pas pour les hommes de partage.
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